Réélection de Maduro au Venezuela | Un mort dans les manifestations spontanées

Réélection de Maduro au Venezuela | Un mort dans les manifestations spontanées

(Caracas) Au moins une personne est morte d’après une ONG dans une des manifestations spontanées qui ont éclaté lundi au Venezuela, ponctuées d’échauffourées avec les forces de l’ordre, après la réélection du président Nicolas Maduro qui suscite le scepticisme de la communauté internationale, l’opposition affirmant de son côté pouvoir « prouver » sa victoire.



Javier TOVAR

Agence France-Presse

« Au moins une personne a été tuée dans [l’État de] Yaracuy et 46 personnes sont détenues » à la suite des évènements postélectoraux, a écrit sur X Alfredo Romero, directeur de l’ONG Foro Penal, spécialisée dans la défense des prisonniers politiques.

« Qu’il rende le pouvoir maintenant », ont lancé lundi des milliers de manifestants dans plusieurs quartiers pauvres de Caracas, certains brûlant des affiches à l’effigie du président, ont constaté des journalistes de l’AFP.

« C’est la fraude la plus huge au monde », s’insurge Luis Garcia, 23 ans, dans la foule des protestataires à Pétaré, dans l’est de Caracas.

« Pour la liberté de notre pays ! Pour l’avenir de nos enfants. Que Maduro s’en aille ! », crie Marina Sugey, 42 ans.

PHOTO SAMIR APONTE, REUTERS

Des manifestations spontanées rassemblant plusieurs milliers de personnes ont éclaté lundi à Caracas après la réélection du président Nicolas Maduro.

Les manifestants, qui ont lancé des pierres, ont été dispersés par des tirs de grenades lacrymogènes alors qu’ils se rapprochaient du centre de la capitale.

Nicolas Maduro a été officiellement proclamé lundi président du Venezuela par le Conseil nationwide électoral (CNE).

Balayant les critiques de l’opposition et de la communauté internationale, M. Maduro a dénoncé une tentative d’imposer un « coup d’État fasciste au Venezuela ».

« Preuves de la victoire »

PHOTO FEDERICO PARRA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le candidat Edmundo Gonzalez Urrutia et cheffe de l’opposition Maria Corina Machado

Lundi soir, la cheffe de l’opposition vénézuélienne Maria Corina Machado, qui n’avait pu se présenter au scrutin automotive déclarée inéligible par le pouvoir, a assuré lors d’une conférence de presse que l’opposition avait les moyens de « prouver » la victoire de son candidat Edmundo Gonzalez Urrutia, discret diplomate qui l’avait remplacée au pied levé.

L’opposition a réuni 73 % des bordereaux de résultats des bureaux de vote et selon elle, M. Gonzalez Urrutia a obtenu 6,27 thousands and thousands de voix, contre 2,7 thousands and thousands au président sortant Nicolas Maduro, proclamé vainqueur par le CNE.  

Mme Machado a affirmé que ces « preuves de la victoire » ont été fournies à « des dirigeants » dans le monde et qu’elles seraient mises en ligne pendant la nuit.

La veille, le chef du CNE avait dénoncé une « agression contre le système de transmission des données qui a retardé » le décompte. Ces décomptes par bureaux de vote que réclament l’opposition et la communauté internationale ne sont pas disponibles.  

Lundi, le parquet a ouvert une enquête, évoquant l’implication de Mme Machado dans ce « piratage ».

PHOTO LEONARDO FERNANDEZ VILORIA, REUTERS

Le président vénézuélien, Nicolas Maduro

Selon les résultats officiels du CNE, M. Maduro, 61 ans, l’héritier de l’ancien président Hugo Chavez (1999-2013), a été réélu pour un troisième mandat consécutif de six ans avec 5,15 thousands and thousands de voix (51,2 %).

Edmundo Gonzalez Urrutia, 74 ans, en a recueilli un peu moins de 4,5 thousands and thousands (44,2 %), d’après le CNE.

L’opposition, qui espérait mettre fin à 25 années de pouvoir chaviste, avait aussitôt rejeté ce résultat.

« Nous allons nous battre pour notre liberté », a assuré lundi soir M. Gonzalez Urrutia, rappelant à « toutes les establishments » leur « devoir constitutionnel de respecter la volonté populaire ».

Il a néanmoins estimé que les « manifestations » du jour ne contribuaient pas à « l’objectif ». À ses côtés, Mme Machado a préféré appeler à des « assemblées populaires » mardi à travers le pays.  

« Dissiper les doutes »

Si M. Maduro a reçu le soutien de la Russie et de la Chine ainsi que de ses alliés habituels (Cuba, Nicaragua, Honduras et Bolivie), il semble être isolé avec l’afflux de réactions négatives ou sceptiques de la communauté internationale.  

Neuf pays d’Amérique latine (Argentine, Costa Rica, Équateur, Guatemala, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Uruguay) ont ainsi appelé dans une déclaration commune à un « réexamen complet avec la présence d’observateurs électoraux indépendants ».

PHOTO YURI CORTEZ, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des opposants au gouvernement du président vénézuélien Nicolas Maduro manifestent devant la police.

Le Brésil et la Colombie, deux pays de gauche, ont demandé une vérification du dépouillement alors que les États-Unis ont affirmé « craindre que le résultat annoncé ne reflète pas la volonté ou le vote du peuple vénézuélien ».

Le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, et la France ont appelé à la « transparence totale », demandant l’intégralité des procès-verbaux et des résultats.

Caracas a réagi à cette levée de boucliers en retirant son personnel diplomatique de sept pays d’Amérique latine (Argentine, Chili, Costa Rica, Panama, Pérou, République dominicaine et Uruguay), estimant que leur place « porte atteinte à la souveraineté nationale ».

Le Venezuela a aussi annoncé suspendre à partir de mercredi les vols avec le Panama et la République dominicaine, dénonçant des « actions d’ingérence » de ces gouvernements.

« Ce n’est pas le résultat idéal pour Maduro », a estimé Rebecca Hanson, de l’Université de Floride. « En termes d’acquisition d’une certaine légitimité internationale – ce qui était un objectif de M. Maduro –, cette élection a été un désastre ».

Intimidations

La campagne et le scrutin se sont déroulés dans une ambiance tendue, l’opposition dénonçant de nombreuses intimidations et arrestations.  

Caracas avait limité la possibilité d’observer le déroulement du scrutin. Le Centre Carter, un des rares observateurs indépendants présents, a appelé le CNE à publier les résultats du scrutin de dimanche dans chaque bureau de vote.

Le Venezuela, longtemps un des plus riches pays d’Amérique latine, est exsangue : effondrement de la manufacturing pétrolière, PIB réduit de 80 % en dix ans, pauvreté, systèmes de santé et éducatif totalement délabrés. Sept thousands and thousands de Vénézuéliens ont fui leur pays.

Le pouvoir accuse le « blocus criminel » d’être à l’origine de tous les maux : les États-Unis avaient durci leurs sanctions pour tenter d’évincer M. Maduro après sa réélection déjà contestée de 2018, un scrutin entaché de fraudes selon l’opposition, qui avait débouché sur des manifestations sévèrement réprimées.