La Presse à Paris | Les Français célèbrent en grande pompe la réouverture de Notre-Dame

La Presse à Paris | Les Français célèbrent en grande pompe la réouverture de Notre-Dame

(Paris) La réouverture de Notre-Dame a pris des airs de grand-messe diplomatique samedi à Paris. Sous les yeux de cooks d’État ou de gouvernement, de riches mécènes et de fidèles de l’Église, la France s’est appliquée à offrir au monde un spectacle d’envergure internationale.



Rafael Miró

Collaboration spéciale

Comme lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, en juillet dernier, les organisateurs ont dû composer avec des situations météo catastrophiques. La pluie et les bourrasques froides ont entraîné l’annulation de tous les évènements qui devaient se tenir à l’extérieur, y compris le live performance, qui a dû être enregistré la veille.

Qu’à cela ne tienne, des milliers de spectateurs, en grande majorité des Parisiens, se sont massés sur les quais de la Seine pour admirer la cérémonie sur cinq écrans géants, à l’endroit même où nombre d’entre eux avaient vu la cathédrale brûler en 2019.

PHOTO CHRISTOPHE PETIT-TESSON, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Vue générale de l’intérieur de l’emblématique cathédrale Notre-Dame de France lors de la réouverture officielle, le 7 décembre 2024 à Paris.

« Je me souviens que le jour de l’incendie, il y avait une panique et une torpeur dans tout Paris », s’émeut Cécile Boursier, venue avec un parapluie et un bonnet pour faire face au froid. « Je n’avais pas le choix de venir, des inaugurations de cathédrales, il n’y en a pas tous les quatre matins ! », s’amuse-t-elle.

La « gratitude » des Français

Dans la chapelle comme sur les quais, un silence solennel s’est installé lorsque le bourdon de Notre-Dame, la cloche la plus large et la plus grave, a longuement sonné pour marquer le début de la cérémonie. Une longue file de soutanes blanches s’est alors dirigée vers la cathédrale, précédée de peu par le président Emmanuel Macron. Applaudi par la foule, l’archevêque de Paris, Laurent Ulrich, a ouvert le portail en le frappant trois fois de sa crosse.

Après un hommage senti aux pompiers et aux artisans, la cérémonie s’est surtout articulée autour de la liturgie catholique. L’archevêque, après un discours de remerciement, a dirigé une messe ponctuée par les chants d’une centaine de jeunes choristes tout en bleu. L’orgue de la cathédrale, qui avait miraculeusement échappé à l’incendie, a aussi retenti pour la première fois depuis cinq ans.

PHOTO LUDOVIC MARIN, REUTERS

Des pompiers posent à l’intérieur de Notre-Dame de Paris avant la cérémonie.

Le discours d’Emmanuel Macron, qui devait initialement avoir lieu sur le parvis pour respecter la séparation entre l’Église et l’État, a finalement été prononcé à l’intérieur à trigger du mauvais temps. « Je me tiens devant vous […] pour vous dire la gratitude de la nation française, gratitude envers tous ceux qui ont sauvé et rebâti la cathédrale », a déclaré le président de la République, devant un parterre composé en partie de mécènes ayant contribué à amasser les 850 hundreds of thousands d’euros (1,3 milliard CAN) nécessaires à la reconstruction.

« La cérémonie est très jolie, mais on despatched que c’est aussi un rendez-vous de gens riches et puissants », exprime Zachary Gauvin, un jeune touriste québécois.






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Gratin diplomatique

Avant même le début de la cérémonie, les médias du monde entier commentaient le ballet diplomatique qui avait lieu dans la capitale française. « C’est très caractéristique de la France d’utiliser ses atouts culturels et sa capacité à organiser de grands évènements comme un outil de rayonnement à l’international », analyse Cyrille Bret, chercheur en géopolitique à l’Institut Jacques Delors.

Brésil, Congo, Italie, Serbie, Géorgie… Au total, une quarantaine de chefs d’État ou de gouvernement se sont déplacés pour assister à la réouverture. C’est toutefois un futur chef d’État qui a surtout retenu l’attention : Donald Trump, qui a eu le privilège d’être reçu en tête-à-tête par Emmanuel Macron un peu avant la cérémonie. « C’est seulement la troisième fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu’un président désigné [des États-Unis] fait un voyage officiel à l’étranger », souligne Julien Tourreille, chercheur spécialiste de la politique étrangère et des États-Unis à la Chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM.

PHOTO JULIEN DE ROSA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Emmanuel Macron et Donald Trump

« Ça peut être un message rassurant pour les alliés de l’OTAN, y compris pour le Canada », explique le chercheur. « Sur le plan de la politique internationale, c’est un très bon coup pour Emmanuel Macron », ajoute le professeur, qui estime cependant que cette invitation pourrait être « incomprise » dans l’opinion publique française.

« Moi, sans être vulgaire, ça me gave qu’un homme comme ça ait été invité à un évènement si symbolique », dit d’ailleurs Nicolas Pillot, un cinquantenaire assistant à la cérémonie avec sa conjointe. « Mais je comprends l’intérêt diplomatique, surtout s’il parle à Volodymyr Zelensky », concède-t-il en ajustant son imperméable.

Le président ukrainien était l’autre invité très attendu de la réouverture. Comme il l’espérait, il a pu rencontrer en soirée le futur président américain, en présence d’Emmanuel Macron au palais de l’Élysée.

PHOTO JULIEN DE ROSA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les présidents Volodymyr Zelensky (Ukraine), Emmanuel Macron (France) et le président américain désigné Donald Trump.

Du côté du Canada, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé vendredi qu’il ne ferait pas le déplacement à Paris. François Legault, en revanche, a bien assisté à la cérémonie, accompagné seulement de son épouse. Dans un communiqué de presse, il a remercié le président français pour l’invitation et l’a qualifiée de « belle preuve » du « lien historique et culturel fort entre nos deux nations ».

Live performance en rediffusion

Après la clôture de la cérémonie par une Marseillaise, le live performance enregistré la veille devant la cathédrale a été diffusé à la télévision et sur les écrans géants. L’artiste québécois Garou, célèbre en France pour sa participation à la comédie musicale Notre-Dame de Paris, a ouvert le spectacle en interprétant son titre phare Le temps des cathédrales.

Sur les quais de la Seine, d’où l’on pouvait voir la façade de l’édifice s’illuminer, l’heure était à la fierté. « C’est un second d’union où tous les Français sont fiers », déclare Henri Boras, un étudiant en mathématiques qui a passé plus de quatre heures sous la pluie pour ne rien manquer. « Avec ce qui se passe en France et dans le monde, je pense qu’on en a tous besoin. »